La Résurrection des morts
Thèse de théologie de Michel Krieger
Traduction de la partie grecque et latine par Georges Krieger
Temps ou la Résurrection des morts doit avoir
lieu
§ XI
Le temps ou cette résurrection doit avoir lieu sera le même que celui de
la venue du Christ : il paraîtra dans toute sa gloire, et sa première action
sera la résurrection des morts. On a cherché à prouver, d'après l'écriture,
que les apôtres regardaient la venue du Christ connue très prochaine et
comme devant avoir lieu de leur vivant. Il y a, en effet, certains passages
des écrits apostoliques qui semblent autoriser cette opinion. Héb., X,
25-37; I Pierre, IV, 7; Jacq. V, 8; Apoc., I, 1 et suivants, II V, XXII; 6 I
Cor., 1, 7 et suivants. On cite comme décisif le passage I Thess., IV, 15.
Saint Paul , dit-on , ne pouvait se servir de l'expression [nous, les
vivants d’alors] sans croire qu'il vivrait encore à l’époque de la venue du
Seigneur; car s'il avait voulu parler en général des hommes vivants à cette
époque il aurait écrit [tous les vivants] , ou au moins [les vivants].
Cette explication résulterait encore de ce que la lettre est adressée à des
hommes vivants, auxquels il veut faire comprendre qu'ils n'auront aucun
avantage sur ceux qui sont déjà morts. On a également cité dans ce but I
Thess., v, 23 ; ce passage nous semble moins important, puisqu'il n'est
nullement besoin d'y voir la résurrection prochaine. Voir I Cor., VII, 29;
X, 11; I Jean, II. 18; Jacq., V.:3. Ce qu’il y a de certain, c'est que cette
attente de la venue prochaine du Seigneur était générale parmi les premiers
Chrétiens; nous en trouvons des traces dans les épîtres des apôtre mêmes.
Elle fut la cause de désordres dans quelques Eglises. Certains abandonnaient
les soins terrestres; d'autres doutaient du Christianisme à cause du retard
de cette venue; d'autres enfin livraient à la crainte en l'attendant tous
les jours.
§ XII
D'autres savants sont allés plus loin, et ont soutenu que Jésus Christ
lui-même parle de son retour comme d'une chose prochaine et comme devant
avoir lieu du vivant de plusieurs de ses contemporains. On cite à cet effet
Matth. XVI, 27 et 28 ; Luc, IX, 26 et 27; Luc, XXI. On s'appuie surtout sur
Matth., XXIV, où le Seigneur semble unir sa venue à la destruction de
Jérusalem et du temple. Il commence par prédire à ses disciples cette
destruction, et ceux ci lui demandent dans quel temps cela arrivera et quels
seront les signes qui l'amèneront; il lie intimement, dans sa réponse, la
destruction de Jérusalem et sa venue ; et au verset 34, il dit même que
plusieurs de ceux qui vivent le verront encore. Le mot [espèce], dit-on ,
peut bien avoir le sens de peuple ( Populus ), et alors il s'agirait du
peuple juif en général , et le sens serait celui-ci: Les Juifs continueront
d'exister jusqu'au retour du Messie. Mais d'autres passages de l’écriture
s'opposent à cette explication. Voir Matth., XVI, 28; Luc, IX. 27.
Quelques Théologiens on essayé d’expliquer Matth. XXIV , comme parlant d'une
venue du Messie pour la destruction du temple et l'extension du
Christianisme ; mais on leur objecte qu'au verset 3, les disciples ne
demandent pas seulement le temps de la destruction de Jérusalem et du
temple, mais aussi celui de la [le plein accomplissement des ages à venir];
ainsi la réponse de Jésus-Christ doit se rapporter à l’un et à l'autre. Aux
versets 4 et 5, ajoute-t-on, Jésus annonce que la destruction de Jérusalem
serait précédée d'un grand nombre de faux Messies; et II Thess., II, 3,
saint Paul les cite comme précurseurs de la venue de Christ. Au verset 29,
il assure qu’aussitôt après la destruction de Jérusalem, le, soleil et la
lune s'obscurciront, et qu’alors il paraîtra d'une manière visible. Cette
opinion serait encore confirmée par Luc, XXI, ou le Seigneur promet, verset
24, à ses disciples, la délivrait de leurs persécutions, et suppose, par
conséquent, qu'ils vivront encore à son retour.
Si ces passages étaient les seuls relatifs a ce sujet, si surtout il n'y en
avait pas de plus explicites, alors ils mériteraient d'être discutés
longuement, puisqu'ils pourraient seuls nous donner la solution de la
question ; Mais il nous semble qu'ils perdent beaucoup de leur importance en
présence des déclarations formelles et indubitables de l'Écriture. Ainsi le
Seigneur a dit lui-même que personne que le Père, lui-même le Fils, ne
connaît le temps de son retour.
Saint Paul dit, en propres termes, que le jour du retour du Seigneur n'est
connu de, personne, I Thess., V. 1, 2 ; de même II Pierre, III, 7, 10.
Il serait téméraire de vouloir établir une doctrine opposée à des passages
aussi formels, aussi explicites, au moyen de raisonnements plus ou moins
hardis, qui souvent ne reposent que sur des hypothèses. D'un côté, il est
clairement affirmé que le jour de la venue du Christ n'est connu de
personne; tandis qu’il faut de longs arguments pour prêter aux auteurs
sacrés l'opinion contraire. Du reste, ils pouvaient être amenés un instant à
cette espérance, de voir le Seigneur bientôt revenir par les souffrances
que, les premières Églises eurent à endurer; car nous voyons que cette
attente de la venue prochaine a puissamment contribué à la persévérance des
premiers Chrétiens (Héb., X, 25; Jacques, V, 8 et 9). Depuis le temps des
apôtres, on ne s'est pas lassé de chercher des explications à ce sujet dans
l'Écriture. Les Chiliastes, qui ont été si nombreux de tous les temps, en
sont une preuve évidente. On a cru que II Thess., V, 3, indiquait le signe
qui doit annoncer le jour du Seigneur; mais ce passage est fort obscur, et
il n'est pas même dit que ce signe doive immédiatement précéder la
résurrection.
Nous croyons donc que l’Écriture ne permet pas de fixer le temps où cette
venue doit avoir lieu. Nous devons nous abstenir de toute recherche à ce
sujet ; ce serait un orgueil coupable de vouloir sonder les choses que le
fils a déclaré ignorer lui-même, et dont la connaissance n'est réservée
qu'au Père.
Qui ressuscitera les Morts ?
§ XIII.
L'opinion était répandue parmi les Juifs que la résurrection devait se faire au son d'une immense trompette; saint Paul aussi se sert de cette image , I Thess., IV, 16; I Cor., XV, 52. Dans beaucoup de passages il est dit que nous serons ressuscités par la voix du Père , I Cor., VI, 14; car Dieu , qui a ressuscité le Seigneur, nous ressuscitera nous-mêmes. Jésus lui-même dit que c'est la voix du Messie qui ressuscitera les morts, Jean, V, 25. Dans les Epîtres, la résurrection est généralement attribuée au Messie, I Thess., I , 10 ; I Col. , XV, 24; Phil., III , 21 ; Jean, VI, 59. Elle est attribuée à Dieu en tant qu'il la fera par le Fils, auquel il en a donné le pouvoir, Jean, V, 21. C'est donc Jésus-Christ que l'Écriture désigne comme devant ressusciter les morts.
Étendue de la Résurrection
§ XIV
L'Ecriture enseigne que tous les hommes, les bons et les méchants,
doivent ressusciter, Jean, V, 28.
Tous ceux qui seront dans les sépulcres entendront sa voix, Act., XXIV, 15;
la résurrection des bons et des méchants arrivera. Un passage capital, c'est
I Col., XV, 21. Jésus y est comparé a Adam; de même que le péché d'Adam
s'est étendu à tous les hommes, de même la résurrection de Jésus comprendra
le genre humain tout entier. Ailleurs, l'universalité du jugement est
formellement enseignée, Matth., XXV, 32 [humanité] ; Act. XXIV, 15; II Cor.,
IV, 4. Elle repose sur l'universalité de la résurrection.
§XV
Une question plus controversée est celle de savoir si tous les hommes
ressusciteront en même temps. Une opinion qui trouva de bonne heure beaucoup
de partisans, consiste à admettre d'abord la résurrection des bons, et leur
existence de mille ans sur cette terre en présence de Jésus-Christ ; et
seulement alors suivrait la résurrection du reste des hommes: c'était celle
des Chialistes. Ces opinions ont leur source dans les écrits de saint Paul
et dans l'Apocalypse ; car ni dans les discours du Christ, ni dans les
livres des autres apôtres, rien n'a pu y donner lieu.
Du reste l'opinion du chiliasme, d'un règne millénaire, n'a aucun fondement
dans l'Écriture, si ce n'est dans l'Apocalypse, qui semble, en effet,
enseigner qu’un temps de mille ans s’écoulera entre la Mort et la seconde
résurrection. Apocal., XX, 4 ; V. Mais ce livre est très obscur, et il
s’agirait de savoir si nous sommes capables d'expliquer les prophéties qu’il
contient. D'un autre côté, l'authenticité de ce livre n'est pas généralement
admise : il serait donc téméraire de vouloir s'en servir comme règle
dogmatique sur un point dont les autres livres ne font point mention.
Saint Paul admet aussi un certain ordre dans la résurrection, I Thess.. IV,
16 [les morts en christ] désigne, sans aucun doute les Chrétiens ; mais ce
serait aller trop loin que de suppléer l'idée que les non-Chrétiens
ressusciteront plus tard , idée que l’Apôtre n'exprime pas explicitement. Le
mot [auparavant] est peut-être alors en opposition avec [aussitôt après] et
le passage ne signifie que ceci : D'abord les morts ressusciteront, et
ensuite les vivants seront transformés. Ce passage ne décide donc rien. I
Cor. XV, 23 ; le mot [achèvement] ne peut désigner que les non-Chrétiens;
car, verset 22, l'Apôtre affirme que tous les hommes ressusciteront , et
voulant ensuite indiquer l'ordre dans lequel cette résurrection aura lieu,
il devait nécessairement nommer, après Christ et les Chrétiens, le reste des
hommes; le mot [après que] qui est en opposition avec [d’abord] prouve
encore en faveur de cette explication. Mais ce passage se tait entièrement
sur l'espace de temps qui doit s’écouler entre les différentes
résurrections.
On a voulu prouver que Saint Paul professait l’opinion chiliaste, puisque II
Thim., II, 12, dit que les pieux régneront avec le Messie, et puisque I
Cor., XV, 25, il ajoute, après avoir prédit la résurrection de tous: Quand
le Fils remettra le règne au Père, c'est-à-dire la fin du règne messianique.
Il faut avouer que ce ne sont que de simples hypothèses; car si saint Paul
avait su quelque chose d'un règne millénaire sur cette terre , il faudrait
expliquer comment il n’en parle pas, lorsqu’il donne des détails exacts sur
tous ces derniers évènements.
Quand à l'opinion d’une résurrection suivant immédiatement la mort, elle
peut se lier à certains passages de l'écriture, II Cor., V, 1; mais elle
n’est nulle part formellement enseignée. La résurrection générale paraît
être celle qui est le plus souvent, mentionnée, dans l'Ecriture. Dans les
passages les plus clairs, saint Paul unit constamment la résurrection et la
fin du monde et au retour du Christ, I Cor., XV, 23; I Thess.,IV, 13. Jean,
28, prouve que ceux qui étaient morts avant sa venue n'étaient pas
ressuscités de suite après leur mort, parce qu’il assure qu’il doit venir
les ressusciter; de même, Jean, XI, 23, le Seigneur ne désapprouve pas
l'opinion d'une résurrection générale ; enfin, Jean, VI, 39 , il est
formellement enseigné que tous les hommes doivent ressusciter au dernier
jour.
Quelle sera la nature des corps après la Résurrection?
§ XVI.
D'après les indications que nous donne l’Écriture à ce sujet, on a
cherché à déterminer exactement quels seraient les corps que doivent revêtir
les âmes après la résurrection. Les uns ont soutenu que ce serait absolument
le même que nous avions sur cette terre; c'était en partie l'opinion des
Réformateurs, qui admettaient une identité totale (indenditas totalis).
Cette opinion entraîne une foule de questions puériles et de difficultés
insolubles.
Ainsi, on a dit : Comment chaque corps pourrait-il recouvrer la totalité de
ses parties au jour de la résurrection, puisque les corps organiques se
décomposent et que leurs parties en forment d’autres? Il arriverait donc que
telle partie aurait appartenu à plusieurs corps humains, et il serait par
conséquent impossible qu'elle leur appartînt à tous à la résurrection. Du
reste, notre corps subit des changements continuels; on a prouvé que le
corps humain est entièrement renouvelé au bout d'un certain nombre, d'années
: il faudrait nécessairement se demander si le corps ressuscité se composera
de toutes les parties qui l'avaient composé sur cette terre, et en ce cas un
homme qui aurait atteint un âge élevé aurait après la résurrection un corps
d’une masse considérable, peut-être huit ou dix fois le poids de celui qu’il
avait avant la mort.
Si l'on ne veut pas admettre cela, il faut revêtir l'âme du corps tel qu'il
était au moment où elle l'a quitté avec toutes les infirmités dont il
souffrait. Voilà (1) quelques-unes des questions puériles et inutiles que
soulève cette opinion. On l’a puisé dans Job, XIX, 25, mais ce passage, tant
controversé, ne parle pas de la résurrection. Elle n'est pas non plus
enseignée dans le Nouveau-Testament. C'est pourquoi Origène (2) déjà
admettait une identité partielle (identitatem partialem), et cette opinion
est généralement partagée par les théologiens modernes, car notre corps
actuel se compose d'un grand nombre de parties qui ne sont faites que pour
cette terre, et dont l’utilité disparaîtra dès que nous entrerons dans
l'économie future, I Cor., XV, 50; Matth., XXII, 30 ; I Cor., VI, 13. De I
Cor., XV, 35, on a conclu avec raison que les corps ressuscités seront
différents des corps que nous avons sur cette terre.
(l) Les Scholastiques sont allés bien plus loin dans leurs
recherches; ainsi ils ont demandé, par exemple, quelle sciait la forme des
enfants, des vieillards? Que deviendraient les infirmités ou certaines
parties du corps, comme l'estomac, les parties sexuelles, etc. Quelques-uns
donnaient aux ressuscités la grandeur et la forme du corps d’Adam; d’autres
la taille et la forme que tout corps doit atteindre sur cette terre; d'autre
la forme de l'adolescence ou de l'homme mûr (perfecti viri); d'autres la
taille de Jesus-Christ (mensura staturae Christi); d'autres enfin, la forme
où chacun meurt, en écartant ou en conservant les infirmités et les défauts.
On n'était pas d’accord sur la question si les méchants garderaient quelques
infirmités comme punition.
(2) Origène s'exprime ainsi d'après la relation de Jerôme à I Cor., XV, 44:
Aliud nobis spirituale et eathereum corpus promittitur, quod nec tactui
subjacet, nec oculis cernitur, nec pondere praegravatur, et pro locorum, in
quibus futurum est, varietate mutabitur.
Alioqui si eaedem carnes erunt, et corpora, quae fuerunt, rursum mares et
faemina, rursum viris hirstum supercilium, barba prolixa ; mulieribus leves
genac, et angusta pectora ad concipiendos et pariendos foctus, et venter et
femora dilalanda sunt : resurgent etiam infantuli, resurgent et senes, illi
nutriendi, hi baculis sustentandi.
[primitivement il était envisagé un corps spirituel céleste, tel qu’il
ne peut être connu par le toucher, ni cerné par le regard, ni jaugé pour son
poids et, au gré du temps et en tout avenir, propre à se modifier
diversement. Ils furent de même chair, mais auparavant mâles et femelles,
auparavant des hommes aux sourcils hirsutes et à longue barbe, auparavant
des femmes à la joue lisse et à la poitrine menue, faites pour la
fécondation et l’enfantement et ventre et cuisse, tous disparaîtront. Seuls
ressusciteront les petits enfant de même que les vieillards, les premiers
comme nourrissons , les autres à soutenir par une canne ]
§ XVII.
On est allé trop loin; d'un autre côté, en admettant une différence totale
des deux corps (diversitas totalis), c'est-à-dire que le corps ressuscité ne
sera dans aucun rapport avec le corps terrestre. L’Écriture n'est pas moins
opposée à cette opinion qu'à la précédente. Car, d'abord l'expression de
résurrection, dont l'Écriture se sert d'un bout à l'autre, ne serait guère
convenable , si le nouveau corps n'avait aucun rapport avec le corps
terrestre. Jésus Christ et les apôtres paraissent nous enseigner une
Identité partielle (identitas partialis). Le même corps qui aura vécu sur la
terre sera ressuscité. Jean, V, 28; [ceux qui sont identifiés ressuscitent]
, Apoc., 20 13 ; Rom. , VIII, 11 ; [le corps mortel, qui a vécu, sera propre
à la résurrection] , I Cor., XV: Phil., III, 21; l'objet de la résurrection
est le [notre corps misérable] dont nous sommes revêtus, I Cor., XV, 34-50.
Saint Paul met clairement les deux corps dans un certain rapport entre eux.
Car verset 43 à 46 il n'oppose pas le corps futur au corps actuel ; il ne
dit pas non plus verset 50 que le corps futur se composera d'une matière
céleste ; car il serait en contradiction évidente avec ses autres
enseignements, et il ne s'agirait plus du tout de la vivification du corps
actuel. On a conclu de II Cor., X, 1-10, que l'homme serait vêtu d’un corps
céleste. Mais les expressions [le ciel est la maison de Dieu], [le ciel], ne
désignent pas le lieu on la matière doit être prise, mais plutôt la cause
qui doit la produire.
Du reste le mot [le ciel] (1), sur lequel on insiste principalement, est
souvent, synonyme de [dieu] . Enfin on peut citer, contre cette opinion,
l'exemple de la résurrection de Jésus ; il a revêtu le même corps qu’il
portait avant sa mort. Sans doute nous ne pourrons pas revêtir de même notre
corps décomposé. Néanmoins il est permis d'en conclure que le corps actuel
est propre à être transformé pour l'écomie future, sans quoi le Seigneur
aurait dû de suite revêtir un autre corps.
(1) Ainsi Matth., XXI, 24, [le ciel] a le sens [de Dieu]. II Machab.,
VII, XII, décide entièrement pour ce sens ; [tout vient du ciel, selon la
croyance dominante et aussi selon la suprême espérance]. Ici [le ciel]
signifie Dieu, et la préposition [par] désigne la cause et non le lieu.
§ XVIII.
Il résulte de tous les passages de l'Écriture que les corps ressuscités seront les mêmes que ceux que nous avons sur cette terre, mais avec de grandes modifications. Il n'y aura donc qu'une identité partielle. Vouloir maintenant déterminer quelles seront la matière et la forme de ces nouveaux corps, c'est soulever une question périlleuse, sinon insoluble. Car avant tout il faudrait connaître les conditions dans lesquelles nous serons placés, et le système de choses avec lequel nous serons en rapport après la résurrection. Mais comme cette connaissance nous manque entièrement, nous ne pouvons faire due des hypothèses à ce sujet , hypothèses d'autant moins certaines, que la vraie nature des choses nous échappe entièrement.
§ XIX
La voie la plus sûre à suivre, c'est de s’en tenir aux enseignements de
l'Écriture. Jésus-Christ lui même enseigne, Luc, XX, 35, que les corps des
ressuscités ne seront plus propres à la reproduction et qu'ils ressembleront
a ceux des anges. De même saint Paul affirme, I Cor., VI, 13, qu'ils
n'auront plus besoin de nourriture, et par conséquent non plus des parties
qui servent à cet effet, I Cor., XV, 48, il dit que nos corps ressembleront
au [des corps selon le Christ].
Il est difficile de bien déterminer le sens du mot [opinion], s’il désigne
en général toute espèce de perfection ou l'idée de lumière. Cette opinion
d'un corps de lumière se rencontre souvent dans le Nouveau Testament ; on
l'attribuait non-seulement aux anges, mais à tous les habitants du ciel ,
Matth., XII, 43; Luc, IX, 31. Saint Paul nous dit aussi avoir vu le Seigneur
sous forme de lumière, Act., IX, 1-22.
§ XX
Le passage capital sur ce sujet, c’est I Cor.,. XV, 35-50, Aux versets 36 à 42 l’apôtre affirme que nous aurons des corps bien différents des corps actuels; mais il ajoute aussi que le corps nouveau sortira du corps ancien ; cette idée se trouve évidemment dans la parabole du grain de blé et de la tige qu’il doit produire. On est. allé trop loin en concluant de cette comparaison que le corps actuel contient virtuellement le germe du corps futur , c'est-à-dire, que le corps ressuscité se développera du corps actuel comme la plante de la semence qui la produit. L'apôtre veut simplement dire que la décomposition du corps terrestre n'empêche pas qu'il y ait certains rapports entre lui et le corps ressuscité, comme la semence aussi est en rapport avec la plante, quoique elle se décompose avant de la produire. Ceci est confirmé par les mots [transformés], I Cor., XV, 51, nous serons changés, transformés. Il est, du reste, bien plus simple d'admettre que Dieu changera notre corps grossier en un autre plus noble, que de supposer qu'il on contient les germes naturels. Au verset 50, saint Paul dit que le corps grossier, sensuel ne peut pas entrer dans le Ciel, et il donne au corps ressuscité les propriétés suivantes : 1° [corps immortel], verset 42 ; ainsi il ne sera plus soumis à la mort, il ne se composera plus de parties aussi grossières ; 2° [corps fort] , un corps qui ne sera plus sujet aux faiblesses et aux infirmités ; 3° [corps spirituel, incorporel], un corps céleste comme celui des anges ; [corps céleste], en général un corps comme celui des habitants du ciel.
§ XXI.
Les hommes qui vivront sur la terre au jour de la résurrection subiront la même transformation. I Cor., XV, 51. On a nié que les corps des méchants doivent y être soumis; car, dit-on, dans tous les passages que nous venons de citer, il ne s'agit que des bons. Ce silence, justement, et la généralité d'autres expressions où il est dit que tous ressusciteront, nous autorisent à rejeter cette opinion comme une hypothèse. Toutes les hypothèses sur la résurrection des morts sont hasardées et périlleuses.
CONCLUSIONS
I
Il résulte de nos recherches : Que la doctrine de la résurrection n'est pas contraire à la raison, puisque cette dernière l'avait trouvée avant la révélation qu'elle est surtout enseignée dans l'Évangile comme étant à la base de la religion chrétienne.
II.
Que nous devons nous contenter des données de
l'Écriture sur ce sujet; ne pas nous livrer à de vaines spéculations, qui
n'aboutissent qu'à des hypothèses sans valeur et à de controverses inutiles.
III
La certitude que nous avons de ressusciter au dernier
jour doit nous consoler dans nos afflictions et nous prémunir contre les
frayeurs de la mort.
Elle doit enfin nous engager à vivre saintement et à conserver nos corps
dans la plus grande pureté, puisqu'ils sont destinés à être transformés et à
servir de demeure aux âmes dans l'éternité
Vu par le Président de cette Thèse :
DE FELICE, Professeur. Montauban, le 2 juillet 1848.
La Faculté ne prétend approuver ni désapprouver les opinions particulières
du Candidat.
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